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Photo du rédacteurRegroupement Naissances Respectées

Y’a absolument rien qui se passe dans ma tête tellement je suis estomaquée

J’ai 22 ans. Je vais au Cégep. Je n’aime pas mon corps. Je me trouve grosse. Depuis tout le temps. Dans les faits je ne suis pas grosse. J’étais ronde, certes, mais sans plus. On est au mois de novembre. Je n’ai pas eu mes règles depuis 3 mois. J’en ai parlé à personne de mon entourage, pas même à mon chum. Ça me stresse énormément. J’ai passé des tests de pharmacie, DES tests. À tous les mois, et à différents moments dans le mois. Toujours négatifs. Pendant ces trois mois-là, je suis stressée parce que j’ai une situation familiale difficile. Avec mon chum ça ne va pas bien. Le Cégep me stress aussi parce que je n’ai aucune idée de ce que je veux faire dans la vie. Je suis anxieuse à l’intérieur, mais rien n’y paraît à l’extérieur. J’ai l’air de parfaitement gérer ma vie. Fin novembre, j’atteins un point tel d’anxiété que je décide d’aller au CLSC parler à quelqu’un. J’ai parlé de tout ce qui me stressait. À la fin, elle me suggère de prendre une source d’anxiété, juste une, et de faire quelque chose pour diminuer mon anxiété par rapport à ce point. Cette journée-là, je décide de prendre rendez-vous chez le médecin pour voir si je suis enceinte. J’appelle à la clinique et on me dit que c’est six mois d’attente pour voir mon médecin de famille. La secrétaire me demande pourquoi je consulte et elle me suggère d’appeler le lendemain matin à la mini-urgence pour voir un autre médecin de la clinique. Ce que je fais et j’obtiens un rendez-vous dans l’après-midi. Je suis assise dans la salle d’attente et tout ce que j’espère c’est de ne pas croiser quelqu’un que je connais. 30 min plus tard, la médecin m’appelle. Je m’assois en face de son bureau, elle écrit quelque chose dans un dossier. J’attends, sans rien dire, le temps qu’elle finisse d’écrire. À ce point elle ne m’a pas regardée ni adressé un mot. Après 2 minutes d’attente, elle se lève la tête, me dévisage et me dit de manière très brusque « tu vas tu me dire pourquoi tu es ici ou faut que j’te demande ? ». À ce moment-là j’ai déjà les yeux pleins d’eau et j’ai juste envie de sortir de son bureau. Pendant ce temps, où je prends mon courage pour lui parler, elle a repris son crayon et continue d’écrire sans me regarder. Je balbutie que ça fait trois mois que je n’ai pas eu mes règles et que les tests de la pharmacie sont tous négatifs. Elle se lève la tête me dit de me déshabiller et d’aller me coucher sur la table. Ce que je fais. J’ai les pieds dans les étriers, à sa demande et j’attends. Elle prend le temps de finir d’écrire sa phrase et me rejoint. Tout ce qui se passe ensuite se passe dans le silence absolu et elle ne me regarde pas directement. Elle va à son armoire, met un gant, met quelque chose que je ne vois pas dans sa main gantée. Elle se retourne vers moi, regarde mon entre-jambes, insère deux doigts très brusquement, j’en fait le saut, pose son autre main sur mon ventre et pèse fort au point où j’ai l’impression que ses doigts à l’intérieur de moi, touche sa main sur mon ventre. Elle va de gauche à droite tout en pesant très fort, ça fait très mal. Elle sort sa main, enlève le gant et retourne s’assoir à son bureau. Je suis sous le choc. Y’a absolument rien qui se passe dans ma tête tellement je suis estomaquée. J’essaie de me ressaisir, je me lève la tête et elle a recommencé à écrire à son bureau. Je lui demande si je peux me rhabiller, elle me répond sèchement « Ben oui ! ». Je reviens m’assoir en avant d’elle. Elle écrit sans dire un mot et sans me regarder. Après quelques secondes interminables, je romps le silence et lui demande si elle a senti quelque chose. Toujours sans lever la tête et de manière très condescendante me dit « Tu es beaucoup trop grosse pour que je puisse sentir quoi que ce soit, je vais te faire une feuille pour une prise de sang. » Elle prend une feuille, la remplit très rapidement et la jette en avant de moi sur son bureau. Elle me dit d’aller la donner à la secrétaire. Je suis sortie de là en tremblant. Je me sentais sale. Je savais qu’elle n’avait pas le droit de me dire des choses aussi méchantes. Et même si j’étais en colère, il y avait une petite voix en dedans de moi qui me disait « Ouin, mais c’est vrai que tu es grosse, t’sais. » Je suis allée passer la prise de sang la journée même. J’ai rappelé à la clinique la semaine suivante pour avoir les résultats et on m’a dit que c’était négatif. Mes règles se sont déclenchées le soir même. Ce n’est que quelques années plus tard, suite à plusieurs situations similaires (où je n’avais pas mes règles pendant quelques mois), suite à des recherches et à des discussions avec d’autres filles que j’ai réalisé que quand je subissais un stress intense je n’avais pas mes règles, et quand la situation revenait à la normale, il ne se passait pas quelques heures que j’avais mes règles.

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